La Commission des relations internationales du Parlement de l'Azerbaïdjan qualifie la Diaspora arménienne de
“tumeur cancéreuse de l’Europe”
Le 16 mars dernier, par une déclaration émise en réaction à la résolution du 15 mars 2023 du Parlement européen portant sur les relations UE-Azerbaïdjan, et qui demandait la levée du blocus par ce pays de l’unique couloir reliant le Haut-Karabagh à l’Arménie et au reste du monde, la commission des relations internationales du Parlement d’Azerbaïdjan a adopté une déclaration dans laquelle la diaspora arménienne est décrite comme « une tumeur cancéreuse de l’Europe ».
Cette qualification de “tumeur cancéreuse” d’un groupe humain, exprimée par la plus haute instance de la représentation nationale d’un pays membre de l’ONU et du Conseil de l’Europe, relève clairement de l’incitation à la haine raciale des Arméniens, où qu’ils se trouvent, en raison de leurs origines ethniques. Elle viole le droit international, notamment, entre autres, l’article 4.c de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et l’article 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de l’ONU.
Circonstance aggravante, cette déclaration injurieuse et raciste vise la Diaspora arménienne européenne, un groupe issu des rescapés du génocide des Arméniens par l’Empire ottoman et la Turquie au début du XXe siècle, commis précisément pour des motifs ethniques. Nous rappelons que l’histoire du XXe siècle nous enseigne que les exterminations de masse sont toujours précédées par des appels à la haine raciale dans le discours officiel du groupe génocidaire, visant à déshumaniser les groupes victimes. Cette déclaration survient à un moment où le chef de l’Etat azerbaïdjanais, le Président Aliev, ne cache pas sa détermination à éradiquer la population autochtone arménienne du Haut-Karabagh, et de poursuivre l’invasion engagée du territoire souverain de l’Arménie.
Nous appelons Madame Colonna, Ministre française des affaires européennes et étrangères, à condamner publiquement cet appel à la haine et à prendre les mesures nécessaires afin de signifier à l’ambassade d’Azerbaïdjan que le racisme à l’encontre de ses concitoyens n’a pas sa place dans les relations de la France avec son pays.
Nous appelons l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) à sanctionner deux députés azerbaidjanais, Nigar ARPADARAI et Samad SEIDOV, membres de l’APCE et co-auteurs de cet appel infâme qui nie toutes les valeurs humanistes qui font les fondements mêmes du Conseil de l’Europe.
Nous appelons l’UE et chacun de ses Etats membres, les ONG internationales de défense des droits humains et de lutte contre le racisme à condamner cet appel à la haine par l’Azerbaïdjan, un Etat classé par l’ONG Freedom House parmi les 16 pays au plus bas niveau de démocratie et de libertés au monde, et qui va jusqu’à recourir à des tentatives d'assassinats politiques de ses opposants réfugiés en Europe.
Cet appel s’inscrit dans le cadre plus large de ce que le Parlement européen qualifie à juste titre de “politique étatique d’arménophobie systématique” (cf Résolution du PE du 11 mars 2022). Il est temps pour la Communauté internationale d’agir enfin envers un pouvoir qui marche dans les pas des dictatures des XXe-XXIe siècles.
Le 27 mars 2023
Appel au format PDF:
Centre COVCAS pour le Droit et la résolution des conflits (Covcas Center for Law & Conflict Resolution), association à but non lucratif, créée en 1991, dont l’objet est de soutenir les principes, objets et actions des Nations Unies, en particulier dans le domaine de la résolution pacifique des conflits et la promotion des droits humains.
Contact : Hilda TCHOBOIAN, Présidente, centre.covcas@gmail.com
Hyestart, créé en 2016, s'engage pour la démocratie et les droits humains en Arménie et en Turquie, tout en soutenant la création artistique contemporaine. Parmi ses membres d'honneur, elle compte notamment l'éditeur et militant des droits humains Ragip Zarakolu ou le Vice-Président de Pen, Eugène Schoulgin.
Contact : Alain NAVARRA, Président, contact@hyestart.org
L’Observatoire d’arménophobie a été créé en 2020, pendant la guerre dans le Haut-Karabagh. Il a pour objet de quantifier les contenus arménophobes, de lutter contre le négationnisme, la désinformation et la haine anti-arménienne.
Contact : B. SHAKHNAZARYAN,
ANNEXE
Textes relatifs à la haine raciale liste non-exhaustive
Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale (CIEDR, ONU, 1969) interdisant toute incitation au racisme
Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP, ONU, 1966) stipulant que « tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l'hostilité ou à la violence est interdit par la loi » France
Loi 1881 : art. 23 et 24 al. 8 sur la liberté de la presse Interdisant la provocation publique à la discrimination, à la haine ou à la violence nationale, raciale ou religieuse.
Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 dite Loi Pleven relative à la lutte contre le racisme.
Loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 dite Loi Gayssot tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe.
Rapports, résolutions, ordonnances internationaux (Arménie, Haut-Karabagh, Azerbaïdjan) liste non-exhaustive
Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Arménie c. Azerbaïdjan) du 22 février 2023 par la CIJ
Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination (Arménie c. Azerbaidjan) du 7 décembre 2022 par la CIJ
ECHR’s interim measure in the case Armenia v. Azerbaijan (no. 4) in relation to the Lachin road on 21 December 2022.
Résolution du Parlement européen du 19 janvier 2023 sur les conséquences humanitaires du blocus dans le Haut-Karabakh
Résolution du Parlement européen du 11 mars 2022 sur la destruction du patrimoine culturel au Haut-Karabakh
“Le PE constate que l’effacement du patrimoine culturel arménien s’inscrit dans le cadre plus large d’une politique étatique d’arménophobie systématique, de révisionnisme historique et de haine à l’égard des Arméniens promue par les autorités azerbaïdjanaises, notamment à travers une déshumanisation, une glorification de la violence et des revendications territoriales à l’égard de la République d’Arménie, qui menacent la paix et la sécurité dans le Caucase du Sud”.
Rapport du Juin 2016 de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance du Conseil de l’Europe) “Les responsables politiques, les établissements d’enseignement et les médias tiennent toujours des discours haineux à l’égard des Arméniens ; toute une génération d’Azerbaïdjanais a grandi au son de ces discours.”
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